Lycéens et apprentis au cinéma en Normandie

L’Atelier critique propose aux élèves de Normandie de publier des travaux critiques dans le cadre de l’opération Lycéens et apprentis au cinéma en Normandie. Articles, débats audio, critiques vidéo et créations graphiques sont mis en ligne par les enseignants inscrits afin de permettre aux élèves de partager leur expérience de spectateur et de mettre en débat leurs réflexions sur les films.

Sentiers de la gloire

Stanley Kubrick - Etats-Unis - 1957

Critique publiée par anquetilrom - le 21/01/2018
Seconde 510, Lycée Le Verrier,
Saint-Lô

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What do you choose between mice or Mausers ?

Treize, c’est le nombre de chefs-d’œuvre que Stanley Kubrick a réalisé avant de disparaître des salles de tournage. De « the Shining » (1980) à « Docteur Folamour » (1964) en passant par « Orange Mecanique » (1971) ou encore « Full metal Jacket » (1987) tous ses long-métrages ou presque sont classés à part dans leurs catégories respectives !

Paths of Glory, c’est tout d’abord un sujets osé qui se démarque de ses pairs de l’époque mais aussi grâce à ses nombreuses techniques et particularités qui font de cette œuvre un très grand succès.

Voici quelques particularités que Kubrick aime tout particulièrement mettre en avant dans tous ces long-métrages. Premièrement, les cercles, qui sont omniprésents faisant partie intégrante du décor. Les personnages vont venir graviter, tourner autour, converger autour de ces cercles, le tout dans une éternelle rengaine, comme dans la scène du jugement où, tel Dieu (le cercle peut être comparé au soleil divin) le cercle prend place au centre de la salle et semble assister pendant toutes les scènes à une certaine chute.

Deuxièmement, beaucoup de points vue de caméra qu’on ne peut apparenter à ceux d’un être humain sont présents tout au long de l’histoire, notamment car la caméra prend plutôt de la distance avec certains personnages, comme si nous connaissions leurs destinées et que nous nous éloignions à temps pour les voir sombrer dans une sorte de désolation mentale.
De plus, de nombreux travellings (coulissements de caméras qui sont propres à Kubrick) uniques à l’époque ou très peu utilisés par d’autres réalisateurs, font naître chez le spectateur un certain suspens, un peu de tension.
La symétrie, chez Kubrick, est presque omniprésente. Beaucoup de scènes sont tournées suivant un axe de symétrie, les salles sont parfaitement identiques des deux côtés de la porte, le passage dans la tranchée se répète inlassablement à plusieurs moments du film.

On ne peut rester insensible aux musiques jouées pour illustrer les psychologies des personnages au début et à la fin. Les musiques sont elles mêmes symétriques. Le film débute avec « La Marseillaise », symbole de fierté française, chant belliqueux fait pour encourager. Et le film se clôt avec un chant allemand, « le fidèle Hussard » un chant presque élégiaque, racontant l’histoire d’une femme ayant perdu son mari, soldat allemand, qui déplore la guerre et chante la paix. Ces chants marquent une certaines différence de mentalité des personnages au début et à la fin. D’ailleur Kubrick ne demande à aucun compositeur de nouvelles musiques, elles existent déjà toutes ! de plus, la musique de fosse est peu présente et les seules musiques qui ne soient pas des bruits sont des musiques jouées par des musiciens figurants. Grâce aux différentes musiques, Kubrick arrive à faire varier le climat général, ainsi il crée une certaine ironie grâce au « mickeymousing » qui fait en sorte que lorsque le général parle, donne un ordre, s’agite, la musique comique ou répétitive le tourne en ridicule et nous met le sourire aux coins des lèvres.

Beaucoup de détails sont mis dans ce film, une statue de Napoléon sur le bureau d’un général lui même mégalomane, montrant l’ironie qu’accorde Kubrick aux belliqueux. De plus dans une scène, lorsque le général inspecte la tranchée, Kubrick s’amuse à appuyer sur le détonateur d’une bombe, à exploser et enfumer la tranchée, révélant l’ironie et la vanité des paroles du général lorsqu’il dit à ses hommes qu’ils vont s’en sortir.

Les lumières sont très efficacement mises à disposition du réalisateur qui se sert de l’éclairage pour faire ressortir la psychologie de ses personnages (l’un des généraux est tout le temps dans l’ombre). Les valeurs (noir et blanc) sont sur le devant de la scène pour souligné l’austérité de la guerre, mais aussi pour que l’on puisse confondre les images filmées avec des images d’archives filmées par des journalistes d’époque.

Au fur et à mesure le chaos s’installe jusqu’en s’enracinant dans le cœur même des dirigeants pour que les pauvres soldats sans grade puissent comme il se doit attaquer et obéir aux ordres.
D’ailleurs, ici, à l’exception du colonel Dax (interprété par Kirk Douglas) , personne ne contrarie le général, sous peine de se faire envoyer en première ligne histoire que le supérieur puisse faire un rapport sur les balles allemandes !!!

En clair, le principe de Stanley Kubrick est simple, prenez quelques mitrailleuses, deux tranchées ennemies, des généraux pourris jusqu’à la moelle, quelques rats et ambiance macabre. Intégrez-y ensuite le sombre, le réaliste, le rebelle Kirk Douglas (1959 : Le Dernier Train de Gun Hill , de John Sturges ou Spartacus, 1960 de Stanley Kubrick ) dans la peau d’un avocat, colonel durant la première guerre mondiale qui va tout faire pour que la justice soit rendue.

Kubrick ne fait rien dans la demie mesure, et va jusqu’à prendre un grand seau d’eau de javel et décrasser complètement les zones d’ombre de la guerre, tant et si bien que la France fera pression sur la maison de production pour qu’il ne sorte pas en France.
Tout d’abord parce que Kubrick réalise Paths of Glory en pleine guerre d’Algérie, aussi pendant la guerre froide et lors d’un mouvement de paix qui prend beaucoup d’ampleur à l’époque mais aussi parce que Kubrick s’attaque aux généraux et à leurs méthodes de diriger leurs hommes. Ainsi, comme l’ont compris les généraux de 1960, le film sort complètement ( comme tous les chefs-d’œuvre du Maître) des sentiers battus et nous emmène grâce à ses travellings si personnels à travers cette histoire alarmante mais plausible.
Le scénario soigné et la fluidité avec laquelle Kubrick huile le tout le rendent à la fois riche, alarmant mais terriblement réaliste !!!

Il est finalement incontestable que cette œuvre marque le public, ne vous retenez pas d’aller la voir, elle vaut le détour !!!