Lycéens et apprentis au cinéma en Normandie
L’Atelier critique propose aux élèves de Normandie de publier des travaux critiques dans le cadre de l’opération Lycéens et apprentis au cinéma en Normandie. Articles, débats audio, critiques vidéo et créations graphiques sont mis en ligne par les enseignants inscrits afin de permettre aux élèves de partager leur expérience de spectateur et de mettre en débat leurs réflexions sur les films.
Stanley Kubrick - Etats-Unis - 1957
Critique publiée par Coline - le 21/01/2018Seconde 510, Lycée Le Verrier,
Saint-Lô
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En 1957, le grand cinéaste américain Stanley Kubrick sort son premier chef-d’œuvre en noir et blanc, inspiré du roman de Humphrey Cobb, « Les sentiers de la gloire ». Il met en scène l’incontournable Kirk Douglas qui incarne le personnage du colonel Dax et aussi Christiane Harlan qui joue le rôle de la femme allemande qui est d’ailleurs la seule femme du film ayant un vrai rôle. Cette dernière deviendra la femme du réalisateur. Son lancement a fait énormément de bruit, il n’est sorti qu’en 1975 en France, qui était d’ailleurs à ce moment là engagée dans la guerre d’Algérie. A cette époque-là on pouvait donc imaginer que Les sentiers de la gloire était aussi une critique de la guerre d’Algérie et de la violence des français envers les pieds-noirs. En effet lors de sa sortie, des anciens combattants et des militaires n’ont pas accepté la réputation de l’armée française, dite sans pitié.
On peut retrouver le génie de la symétrie de Kubrick, qu’on peut observer dans beaucoup de scènes, comme celle du procès avec le cercle au milieu de la pièce ou encore dans le bureau de Mireau avec deux fenêtres symétriques. On retrouve également des caractéristiques du style de Kubrick, les cercles, mais aussi sa façon de tourner les scènes avec beaucoup de travellings.
En 1916, le général Broulard propose une promotion au général Mireau s’il réussit à attendre et contrôler la « fourmilière », qui est une position allemande. Mais cette mission va s’avérer être une mission suicide. Le colonel Dax essaye tant bien que mal d’y prendre position, en vain. À l’annonce de cet échec, Mireau ordonne de tuer cent soldats pour « lâcheté ». Mais Dax et Broulard finissent par se mettre d’accord, trois soldats seront jugés lors d’un procès.
À l’arrivée des condamnés au procès, on découvre une immense pièce avec de larges et grandes fenêtres quadrillés, qui ne donnent sur aucun paysage, la luminosité ne paraissant pas naturelle au début, elle s’atténuera, ainsi nous pourrons voir des maisons à travers les fenêtres. On peut interpréter ce changement comme une représentation théâtrale d’un procès, avec de fausses fenêtres et dans une fausse lumière. Les condamnés sont cadrés en gros plan alors que la Cour n’est qu’une simple ombre, en effet pendant cette scène, elle nous donne l’illusion de ne pas avoir de visage, d’être inaccessible. Cette impression se confirme lorsque Dax essaye de prendre la défense des condamnés, ses arguments ne sont pas pris en comte par la Cour, qui est, avant même de commencer ce procès, fixé sur sa décision finale. A cela s’ajoute le fait que lorsque Dax est assis, il se retrouve emprisonné par le quadrillage de la fenêtre. On peut aussi voir le sol en damier, comme un échiquier, un jeu de stratégie, de même que le président de la Cour est placé juste en dessous du drapeau français, tous ces détails nous montrent que ce procès n’est qu’une caricature, le président ne prend même pas la peine de lire l’acte d’accusation, il ne représente pas correctement la France, c’est un procès artificiel et théâtrale. Les dialogues sont essentiellement composés d’ordres, ce qui se reflète dans la Marseillaise, qui est la musique du générique, elle est d’ailleurs accentuée par des percussions et s’achève par une fausse note qui représente la défaite. La Marseillaise est opposée à la dernière chanson, qui est dans la dernière scène, c’est une chanson allemande qui fait ressentir des émotions, avec des paroles plus douces et ce n’est seulement que dans la dernière scène qu’on voit les visages des soldats qui étaient déshumanisés. On peut enfin leur donner une identité.
La vision de la guerre de Kubrick est fondée sur un mécanisme de déshumanisation des soldats et sur l’écart de statut entre les soldats et les hauts-gradés que l’on retrouve dans les décors, la musique, la lumière et les plans. La parodie du procès et la déshumanisation des soldats sont un cri de révolte contre l’absurdité de la guerre.Tout comme Les Sentiers De La Gloire, « Full Metal Jacket », sorti en 1987 critique la guerre, ce sont plus que des films de guerre, ce sont en fait des œuvres antimilitaristes.