Lycéens et apprentis au cinéma en Normandie

L’Atelier critique propose aux élèves de Normandie de publier des travaux critiques dans le cadre de l’opération Lycéens et apprentis au cinéma en Normandie. Articles, débats audio, critiques vidéo et créations graphiques sont mis en ligne par les enseignants inscrits afin de permettre aux élèves de partager leur expérience de spectateur et de mettre en débat leurs réflexions sur les films.

Babel

Julie Bertuccelli - France - 2013

Critique publiée par Lucile - le 20/05/2014
Seconde 6, La Morandière ,
Granville

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Bienvenue en France !

« La cour de Babel » est un documentaire français parlant de l’immigration de jeunes en France. Il est sorti en 2014, et a été réalisé par la talentueuse Julie Bertuccelli. Celle-ci a déjà réalisé de nombreux documentaires comme « Saint Denis, les couleurs de la ville » ou encore « Un dimanche en champagne ». Dans son documentaire « La cour de Babel » Julie Bertuccelli met en scène de nombreux jeunes venant des quatre coins du monde, ainsi que leur professeur de français Brigitte Cervoni. Durant une année scolaire complète, nous suivons la progression de ces jeunes élèves adolescents d’une même classe.

Voilà quelques mois qu’ils sont en France. Ils viennent du monde entier ils sont Irlandais, Serbes, Brésiliens, Tunisiens, Chinois ou Sénégalais... La réalisatrice de ce film Julie Bertuccelli a filmé un groupe de collégiens âgés de 11 à 15 ans venus en France pour apprendre notre langue. Durant un an, elle a fait partie de cette classe d’accueil, les échanges, les conflits et les joies ont fait partie de son quotidien. Les adolescents tous animés par le même désir de changer de vie, se remettent en cause et ont tous de grandes ambitions pour l’avenir...

Le documentaire de Julie Bertuccelli aurait pu être une véritable réussite car c’est un film plein d’espoir, de respect et d’émotion sur l’adolescence et l’intégration. Il raconte autant l’aventure humaine de ces classes d’intégration, qu’il dresse le portrait de ce qu’est l’immigration. Cependant, celui-ci s’égare en voulant évoquer de trop nombreux sujets. De plus, ce film ressemble un peu trop au film du réalisateur Laurent Cantet avec son drame « Entre les murs » qui raconte l’histoire d’une classe de quatrième dans une banlieue en Seine Saint- Denis.

La Cour de Babel est à l’image des migrants qui viennent en France pour des raisons différentes. Pour certains ce sont des raisons économiques, d’autres cherchent à fuir des persécutions. Mais il y a aussi certains élèves qui viennent pour des raisons familiales ou personnelles : de temps en temps c’est pour fuir des maltraitances et l’impossibilité d’aller à l’école en tant que fille. Globalement c’est une décision de survie, d’amélioration de vie ou de changement de vie. Tous ces parcours sont évoqués, par les enfants eux mêmes, et cela aurait pu être très intéressant et très touchant, mais on sent une complicité excessive et une relation des enfants entre eux qui paraît artificielle.

Les discussions au sein de la classe sont intéressantes, les élèves sont invités à partager leur ressenti, ce qui va et ce qui ne va pas, les questions de langue, de culture, de religion -ce qui peut de temps en temps déranger certaines personnes- le déracinement, le manque du pays d’origine, l’éloignement de la terre ou de la famille. Chacun écoute, interrompt, ne comprend pas toujours l’autre mais la parole est libérée. Dans cette classe ils partagent aussi leurs souhaits pour l’avenir, car ces jeunes ne sont pas des adolescents comme les autres. Ils ont voyagé, ont dû affronter l’incompréhension, la barrière de la langue, et se posent des objectifs très élevés parfois même trop.

Le film montre avec une grande empathie cette envie de bien faire, de réussir, et de ne pas décevoir leurs parents ou leurs proches...

Ce qui peut aussi nous déranger, c’est la qualité de l’expression orale des jeunes qui est parfois difficile à comprendre. Pour finir, ce film s’arrête assez brutalement et certaines personnes aimeraient sans doute une fin où l’on voit ce que sont devenus les élèves et s’ils ont atteint leurs objectifs.

Le film est accompagné d’une musique assez sautillante et joyeuse mais peut être trop répétitive et lassante. Mais il y aussi certains moments ou les élèves de la classe montrent leurs talents, par exemple le jeune violoniste, qui fait part de son savoir en leur jouant un morceau. Il y a aussi une jeune fille qui souhaite devenir chanteuse et aussi actrice, qui chante une chanson dans sa langue natale, ce qui plaît beaucoup aux autres élèves. Dans ce film, Julie Bertuccelli a su nous faire voyager grâce à ces mélanges de genres musicaux. Certaines personnes pourraient trouver que la musique est inappropriée car ce n’est pas forcément un film joyeux.

Artistiquement, la réalisatrice avec l’aide de la maîtresse ont su faire une prouesse. Elles ont réussi a faire oublier aux élèves qu’ils étaient filmés, et qu’il fallait qu’ils restent eux- mêmes comme s’ils n’étaient pas filmés. Durant toute l’année scolaire, Julie Bertuccelli a réussi a filmer les élèves seuls mais aussi avec la maîtresse, entre eux, avec leurs parents, c’est d’ailleurs ce qui est intéressant car du coup on connaît la situation de la famille, de l’enfant, l’origine de son départ, ainsi que ses difficultés... C’est l’un des points positifs de ce documentaire.

Pour certains cinéphiles, ce film pourrait bien être des plus ennuyeux, alors que pour les amateurs de documentaire « La Cour de Babel » est une pépite, un film populaire drôle, émouvant aux larmes, passionnant, qui divertit autant qu’il informe sans jamais donner de leçons. Ce sera donc pour eux un documentaire à voir absolument et sans hésitation.

Lucile Gogo et Mathilde Hamon-Mejias